Hauts-de-Seine,Rueil-Malmaison
Rueil-Malmaison: explosion de couleurs, formes, graff et oeuvres monumentales, les cadors de l’urbex investissent la ville impériale

Après le palais de Tokyo et la Villa Médicis, les artistes Lek et Sowat s’exposent à l’atelier Grognard, pour une rétrospective de leurs oeuvres mêlant peinture, photo, calligraphie, architecture. Un voyage éclatant dans ce lieu qui fut une fabrique de cuivre et de zinc.

Rueil-Malmaison, le 1er avril. Passionnés de street art et d'urbex, Lek et Sowat, artistes connus et reconnus, sont exposés dans la galerie Grognard, en face du château de la Malmaison. LP/Olivier Bureau

Par Olivier Bureau
Le 8 avril 2022 à 13h37

On est loin de leur terrain de jeu habituel. L’atelier Grognard, juste en face du château de la Malmaison, accueille un duo qui tranche avec l’atmosphère de la ville impériale : Lek et Sowat, deux artistes venus du graff et du street art, deux passionnés d’urbex, l’exploration urbaine d’anciens sites industriels. Sur 650 m2, l’atelier Grognard, en collaboration avec la galerie Polka, propose donc une vaste rétrospective de la carrière déjà très dense de Lek et Sowat, ou Fred et Mathieu pour l’état civil, respectivement âgés de 50 et 43 ans. « À la base on vient de la peinture, du graff, et avec l’âge on s’est intéressé à la photo, la vidéo… », précise le premier.

Quand les deux hommes se rencontrent il y a une douzaine d’années, ils partagent une passion, l’exploration urbaine. « On en faisait depuis les années 1990, quand cela ne s’appelait pas encore urbex. Comme tout le monde, on aimait aller dans les maisons abandonnées, les friches industrielles », se souvient Sowat. Maisons, usines, postes EDF désaffectés, lieux souterrains, les possibilités sont infinies.

« Il y avait d’abord l’adrénaline, l’excitation de l’intrusion. Ensuite, on s’est intéressé à l’aspect artistique de ces sites. On l’a intégré à notre travail avant que cela n’en devienne le moteur, complète Sowat. Nous sommes des enfants de la désindustrialisation. Ces chapelles de béton exercent une vraie fascination sur nous. » Les formes, les couleurs, l’architecture intègrent leur travail. S’ils transforment ces chapelles brutes en y peignant des fresques, jamais ils ne les détériorent.

Finalement, leur venue dans l’atelier Grognard n’est pas si incongrue que cela. Avec ses imposantes poutrelles métalliques, cette galerie a été aménagée dans une ancienne fabrique de cuivre et de zinc qui servait à la photogravure à l’époque de Gustave Eiffel. « C’est exactement ce qu’on cherchait », résument-ils en chœur.

Depuis le début de leur carrière à quatre mains, Lek est l’homme des formes géométriques, de l’architecture. À Sowat, l’écriture stylisée, la calligraphie explosive et colorées, des mots plus ou moins discernables…

Le duo s’est fait une place de choix sur la scène artistique mondiale. En 2012, Lek et Sowat transforment un centre commercial désaffecté du nord de Paris en friche artistique sauvage, c’est le Mausolée. C’est ce coup de maître qui leur ouvre les portes du palais de Tokyo de décembre 2012 à juin 2014. L’année suivante, direction Rome et l’Académie de France dans la prestigieuse Villa Médicis, ce palais du XVIe siècle. « Ils sont les premiers artistes issus du graffiti à être pensionnaires de la Villa Médicis », rappelle-t-on à l’atelier Grognard. Ils y resteront un an.

La suite est tout autant démesurée : peindre un tunnelier, un géant d’acier de 10 m de diamètre, utilisé lors du prolongement de la ligne 14 du métro en 2019 ou encore réaliser une gigantesque installation la même année au pied du centre Pompidou à Paris. Le dispositif a été décroché fin 2021.

À travers une centaine de pièces, c’est ce parcours que retrace le voyage dans l’atelier Grognard. Dans la partie consacrée au Mausolée, des dizaines d’objets hétéroclites abandonnés puis récupérés dans le centre commercial font figure de fossiles de la société de consommation.

Pas besoin d’être un expert en art contemporain pour être frappé par ces œuvres qui parlent autant au cerveau qu’aux tripes. Impossible de rester de marbre devant ces formes, ces couleurs et même le gigantisme de certaines réalisations comme le tunnelier qui prend des airs d’improbable vaisseau spatial ou souterrain sous la patte de Lek et Sowat.

Jusqu’au 3 juillet, à l’atelier Grognard, 6, avenue du Château de Malmaison, à Rueil-Malmaison. Tarif : 4 et 6 euros. Renseignements sur https://www.villederueil.fr/fr/latelier-grognard et au 01.47.14.11.63.

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